Jour 1 : Lagnieu - Charvieux


Levée avant l’aurore. Mes sacoches et mon barda sont prêts depuis la veille. Le temps est mitigé et les étoiles boudent derrière les nuages. Je quitte la maison pour aller chercher les chevaux au pré. Quartz et Kayenne se posent quelques questions, c’est un peu tôt pour une simple balade. Je les installe à côté d’une carriole où je peux m’étaler à outrance pour disposer les sacoches, les selles et tout le matériel. Les chevaux me regardent m’activer, mi-figue mi-raisin. Kayenne n’a pas l’air emballé. Quartz reste flegmatique, comme de coutume.

Kayenne, sellée  Quartz, sellé

Je monte Kayenne les trois premiers jours et inflige à Quartz la dure tâche de porter le matériel. Il fera le veau et la nouille pendant trois jours, m’obligeant à descendre souvent et à marcher régulièrement à côté de lui. Il ne veut pas rester derrière, il s’arrête pour de multiples raisons. Les premières fois je me demande s’il n’a pas mal aux pieds. Mais ce voyou me suit dès que je le fais passer devant Kayenne. Nous partons à 9h30. Je suis dans le timing. Nous descendons la colline du Charveyron pour rejoindre le bord du Rhône puis le village de Saint Sorlin en Bugey.


Sur les berges du Rhône  Saint Sorlin en BugeyLes chevaux, en cheminKayenne, en chemin


Nous suivons le GR de pays du Beaujolais-Bugey et de la Dombes jusqu’au village de Fay puis nous nous raccrochons au GR 59 jusqu’à la fin de la soirée. Au-dessus du village de Fay, je m’arrête. Mon ventre crie famine et les chevaux ont besoin d’une pause. Je décharge tout ce petit monde et m’installe tandis que le vent se lève. Je mets du temps à tout recharger, mes systèmes de fixation pour chaque sacoche relèvent plutôt du bidouillage que du grand art et je mets plus d’une demi-heure à rééquiper les chevaux. Il faut que je réajuste une hipposandale qui fait semblant de fuir. Un câble se détend. Une fois remis, il ne bougera plus. Nous suivons les crêtes au-dessus des villages de Souclin et de Soudon. Les arbres nous abritent du vent, mais les chevaux renâclent à avancer convenablement. Ils traînent, s’arrêtent, repartent mollement et me font perdre patience. Nous arrivons néanmoins à 16h00 au Grand Golet. Nous sommes toujours dans les temps. Le Rhône serpente dans une vallée autrefois façonnée par les glaciers, aujourd’hui déformée par les doigts métalliques des machines agricoles. 

À 17h00 nous approchons de notre point de chute. Mais l’excitation des débuts s’estompe. Je suis fatiguée, guère motivée. Je me demande ce que je fais là. C’est la première journée critique, une fois passée, je sais que tout ira mieux. Mon oncle nous a rejoints en voiture non loin du monastère des Chartreux. On discute, puis je continue ma route. Je perds un peu de temps à écouter un agriculteur qui m’explique avec moult palabres où il convient de passer pour ne pas effrayer ses bêtes et quel portail il faut refermer et sur quel sentier. Je lui assure que je suivrai ses recommandations et continue mon chemin jusqu’à Charvieux. La dernière descente est corsée. Glissante, légèrement exposée. Pour une fin de soirée, j’aurais pu faire mieux. Pepette, mon hôte, m’accueille ainsi que les chevaux dans sa maison au confort inégalable à mes yeux. Repas entre cavalières, assiette copieuse, rigolade et papotage. Je m’endors dans un lit, un vrai, et ce seul confort vaut tous les trésors du monde. Je n’ai pourtant commencé la randonnée que ce matin, mais j’ai l’impression d’avoir quitté le train-train quotidien depuis des mois. Merci Pepette !

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